Olivier PAQUET
Jardin d’hiver
Editions L’Atalante, 2016
416 pages
Présentation de l’éditeur
Dans le contexte du réchauffement climatique, un conflit est né en Europe entre des ingénieurs réunis sous la bannière du Consortium et des groupes écoterroristes de la Coop. Cette guerre dure depuis près de 20 ans, suite à un incident appelé » le crime du siècle « . Chaque camp a développé ses propres armes : des animaux-robots pour les ingénieurs, des plantes mécanisées pour les écologistes.
La Tchaïka, que pilote Natalia, abrite une bande de cosaques qui récupèrent des pièces détachées après les batailles et dont la philosophie se résume à cette maxime : » Nous sommes des contrebandiers, des gens qui refusent d’appartenir à un camp au nom de notre choix d’emmerder le monde. »
Un soir, ils tombent sur un inconnu amnésique au comportement étrange. Cette découverte leur fera traverser l’Europe à la recherche du passé et des germes du futur.
Le travail sur la Tchaïka n’est pas de tout repos. Si les contrebandiers ratissent les champs de bataille une fois que les combattants l’ont quitté, ils doivent rester vigilants pour ne pas déclencher les nombreuses armes laissées sur place par les belligérants : les animaux-robots du consortium tirent à vue sur eux, tandis que les plantes-bombes de la Coop ne font pas la distinction entre les différents camps. Mais le champ de bataille où ils récupèrent cet inconnu est inhabituel. Ils trouvent nombre de carcasses d’aéronefs à désosser, mais les morts sont nombreux et ce qui les a causé est inquiétant. En effet, ils ne souffrent d’aucune blessure physique. L’un des deux camps semblent avoir développé une arme encore plus destructrice.
Voilà l’équipage plongé au coeur du conflit, conflit auquel vient s’ajouter une troisième faction qui cherche à tous prix à mettre fin à cette guerre. A ces trois factions qui s’opposent, s’ajoutent une intelligence artificielle, une Epée (c’est-à-dire un guerrier sanguinaire que rien n’arrête), et une entité mystérieuse : Jardin d’hiver. L’action est par moment un peu confuse : tout n’est qu’alliance, trahison, conversation éthique ou divergence de point de vue idéologique.
Mon avis est un peu plus modéré que quand j’ai acheté ce roman. En effet, j’avais eu un coup de coeur pour cette couverture, et lire sur la quatrième de couverture les mots « animaux-robots » et « plantes mécanisées » dans la même phrase avait fini de me convaincre. D’abord, il y a cette impression que les personnages tournent en rond : ils vont dans un lieu, déterminés à faire quelque chose, mais rien ne se passe comme prévu, ou l’un d’eux change d’avis, et les voilà repartis en sens inverse, et ça de la Méditerranée à l’Islande. C’est assez frustrant parce qu’on a l’impression qu’ils agissent en vain. Le côté contrebandier est aussi peu mis en avant par rapport à ce qui est dit dans le résumé. Certes, ils sont pivots dans l’histoire, mais on suit moins leur mode de vie que leur changement de cap au gré des caprices de l’un ou l’autre des belligérants. Il m’a aussi semblé que certains dialogues partaient dans des discussions éthiques interminables – qui sont aussi un ressort du récit – mais qui m’ont semblé plus confuses qu’autre chose, et j’avoue n’y avoir pas compris grand chose (mais ça, c’est peut-être juste dû à l’état de fatigue dans lequel j’étais quand j’ai lu ce roman).
Cependant, cela ne doit pas vous arrêter : ce roman a aussi plein de qualités. Tout d’abord, il y a de très bons concepts de science fiction, autour de l’intelligence artificielle notamment. Et j’aime beaucoup la vision qu’il offre d’une forme de compromis entre le végétal, l’animal et la machine. Enfin, il n’y a aucun angélisme sur le conflit ou sur les partis en présence. Il n’y a aucun parti pris, ni pour le Consortium ni pour la Coop, et la conclusion arrive à dépasser cet antagonisme de façon remarquable. De plus, l’écriture est plutôt efficace, et se laisse aller à un peu de poésie, ce qui est plutôt agréable. Enfin, j’ai beaucoup aimé comment l’auteur dépeint la société du Consortium, et le mode de vie des habitants de Mégapole. C’est ville gigantesque au coeur même du Consortium, et les innovations architecturales que technologiques (notamment tout ce qui peut être une forme évoluée de nos réseaux sociaux et de nos objets connectés) qui la composent et ce qu’elles induisent en terme de mode de vie, d’interaction sociale etc. m’ont vraiment intéressée.
Ainsi, je suis peut-être moins enthousiasme à propos de ce roman que je ne l’étais au moment où je suis tombée dessus en librairie – à cause d’une certaine fatigue qui rendait la lecture laborieuse. Mais j’en garde vraiment un bon souvenir, et maintenant que mon avis a mûri, je le conseille aux personnes qui aiment la SF et à celles qui n’ont pas peur quand on prononce les mots « intelligence artificielle ».